Fady Ambroise

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lundi 8 octobre 2018

«Honneur et horreur », lettre de Bia au Dr Mukwege, Prix Nobel de la Paix


[Honneur et horreur]
Lettre au Docteur Mukwege, Prix Nobel de la Paix 2018
Par Biatitudes


Bonjour Docteur,

Je prends la liberté de te tutoyer. Je n'aime pas la distance que crée le vouvoiement. Et aujourd'hui c'est de ta proximité dont j'ai besoin. De la proximité de ton sourire paternel. Cet air zen que tu dégages perpétuellement alors que ta vie doit être furieusement stressée. J'avais prévu de t'écrire une lettre pleine d'effusion, dans laquelle on aurait mis entre parenthèses les horreurs que toi et ce pays, en particulier la partie où tu officies, vivez au quotidien.

Oui j'avais prévu de faire une lettre positive. J'aurais juste souligné la magnifique récompense que ton dévouement a enfin gagnée. J'aurais souligné la joie de toutes ses femmes pour lesquelles tu as un peu pris la place de Dieu. J'aurais dit merci de placer le Congo sur la carte égoïste des opinions occidentales et les autres. J'aurais parlé du bien que va faire ton prix Nobel à la cause que tu défends. J'aurais dit mon admiration à la personne que tu es, au courage dont tu as fait preuve, à la résilience que tu as développée, à l'humilité que tu as continuée d'afficher. J'aurais écrit que désormais dans la galerie des hommes que j'admire, ton buste prendra une place méritée à coté de celle de Lumumba.
Pendant que tournaient dans ma tête, les mots pour dire tout ça, les meilleures formules pour ressortir toute ma fierté, mon admiration, ma joie, pendant que prenaient corps dans mon esprit les tournures pour que les horreurs que tu répares ne gâchent pas la fête, pendant ces moments où mes plus belles phrases prenaient forme, il y a eu Mbuba.

L'horreur encore une fois. L'horreur s'est imposée encore dans l'actualité congolaise. Jalouse et furieuse, que toi, son antithèse la plus en vue, lui vole la vedette. C'est vrai, cette fois, c'est bien un accident, ni forces obscures manipulées par les impérialistes, ni troupes isolées et hors de contrôle. C'est un banal et cruel accident comme il y en a dans le monde entier. Les ministres peuvent respirer ! Cette fois, le docteur Mukwege ne pointera pas le doigt sur leur incurie et leur incompétence. Mais oui voilà, le candidat (autoproclamé favori) pourra cette fois, dire le fameux « Dieu a donné, Dieu a repris », c'est la fatalité n'est-ce pas ? La fatalité de l'horreur qui a élu domicile dans ce pays, qui ne l'est plus que de nom, la fatalité qui prend le visage des difficultés à intervenir efficacement pour venir en aide aux victimes de ce regrettable accident. C'est la même fatalité qui empêche certainement le gouvernement d'intervenir efficacement contre les forces obscures qui endeuillent le Congo, à l'Est, au Sud-est, au Nord-est, au Centre.

Cette fatalité, toi, docteur Mukwege, tu as fait le choix de la combattre. Chaque jour, tu nous administres une magnifique leçon, la fatalité n'est que l'autre nom que nous donnons à nos démissions. Nous pouvons porter en nous le déclenchement du cycle vertueux qui transformera nos êtres et celui de notre Nation. Au-delà de l'habilité de tes mains, au-delà du courage dont tu as fait montre pour persister dans ta mission malgré le danger, c'est cette magnifique leçon que l'académie des héritiers de Monsieur Nobel a décelée et valorisée. Et cette leçon vaut bien une lettre ratée.

Bravo, compatriote.
Par Biatitudes
Biatitudes, écrivain et poète Rd congolais

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